une vie de canapé

Je me suis énervée contre ce satané canapé. Ses coussins ne tiennent pas à leur place et je passe mon temps à les repositionner. J'ai décidé qu'il ne nous suivrait pas à Rennes.

Néanmoins, je lui rends hommage pour ses bons et loyaux services rendus fidèlement ces seize dernières années. Ce canapé nous aura suivis de Montigny le Bretonneux vers le Mans vers Hampton Place aux Etats Unis vers Newark, toujours en Californie, vers Téloché (déjà recouvert deux fois) vers Hong Qiao à Shanghai ( recouvert une troisième puis une quatrième fois) vers le Cannet vers Mandelieu, vers la rue du lac à Cannes et ici,vers ce qui sera peut être sa dixième et dernière demeure.

Il aura voyagé dans de petis camions, dans des gros et des énormes, pris plusieurs fois le bateau, sans voir la lumière pendant de longues semaines.
Il aura été jaune et bleu, style provençal originellement, blanc avec d'immenses branches de lilas, rouge framboise (recouvert par un chinois dans du tissus ikéa) puis tapissé en suédine écrue aux passe-poils vieux rose. Une première housse en lin naturel pour notre retour en France. Ecumée. Une deuxième housse...qui s'use.
Je pense qu'il est temps de lui accorder sa retraite et de le laisser emporter avec lui tous ses souvenirs.
Il en aura reçu des postérieurs d'enfants, d'amis et de personnalités en tout genre.
Parfois, malmené par quelques postures affalées, par des sauts et des plongeons pourtant interdits.
Il aura accueilli des voyageurs de passage, les laissant se reposer en ouvrant son corps pour offrir le lit qu'il cache.

A ton tour, mon vieux, de te reposer !